Sous les lumières éclatantes de Lyon, ville historiquement ancrée dans le septième art, un événement captivant a récemment donné vie aux écrans noirs et blancs : le Festival Lumière. Chaque année, ce rendez-vous est l’occasion d’un voyage à travers les âges du cinéma, de ses légendes aux étoiles montantes. Et si les écrans du festival vibrent souvent aux résonances des classiques hollywoodiens, cette année ils ont dansé au rythme du fado et des vagues de l’Atlantique. Oui, le cinéma portugais a su trouver sa place, et de quelle manière, dans cet univers dédié à la révérence et à la redécouverte du cinéma. Une 15e édition qui marquera les esprits, tant pour la qualité de sa programmation que pour l’hommage vibrant rendu à une cinématographie souvent mésestimée : celle du Portugal.
L’importance du Festival Lumière dans le panorama cinéphile
Chaque année, la ville de Lyon devient l’épicentre du cinéma classique et de la cinéphilie grâce au Festival Lumière. Cette manifestation culturelle d’envergure internationale rassemble un large public, des experts aux amateurs, autour d’une programmation diversifiée et exigeante. Cette année, pour sa 15e édition qui se déroule du 14 au 22 octobre, le festival a décerné son prestigieux prix Lumière à Wim Wenders.
Ce festival n’est pas seulement une vitrine pour les œuvres d’art cinématographiques bien établies, il sert également de tremplin pour la redécouverte de perles rares et d’innovations cinématographiques. La section “Trésors et Curiosités“, en particulier, est l’endroit où les passionnés peuvent découvrir des films qui ont été négligés ou oubliés au fil du temps.
Lyon, ville qui a vu naître le cinéma avec les frères Lumière, continue donc à honorer cet héritage en étant l’hôte d’un festival qui offre une plateforme aux voix moins entendues du cinéma mondial. Cette année, un coup de projecteur était ainsi donné au cinéma portugais.
Le festival ne se contente pas de projeter des films; il constitue également une occasion unique de dialoguer avec des cinéastes, des acteurs et des critiques. Des tables rondes aux projections spéciales, le festival cherche à créer un véritable écosystème cinéphile.
Cette édition a aussi été marquée par des hommages et rétrospectives, enrichissant ainsi le champ sémantique du cinéma en permettant des analyses en profondeur. Parmi eux, le cinéma portugais a reçu un hommage particulièrement vibrant.
Un événement d’une telle envergure mérite une attention particulière non seulement pour son impact sur l’industrie cinématographique, mais aussi pour son rôle en tant qu’incubateur de talents et de pensées novatrices.
La réapparition de Les Îles enchantées : une pépite portugaise ressuscitée
Un des moments forts de cette édition a été la projection de Les Îles enchantées de Carlos Vilardebó, sorti en 1965. Ce film, d’une grande rareté, a la particularité d’être le seul long métrage de fiction réalisé par Vilardebó, qui a principalement travaillé sur des courts métrages et des documentaires.
Un casting d’exception
Le film met en scène la légendaire chanteuse de fado portugaise, Amália Rodrigues, et le jeune acteur français Pierre Clémenti. Ce choix de casting n’était pas anodin ; il témoigne d’une volonté de mélanger les genres et les talents de différentes origines.
Le fait que la star de la musique portugaise Amália Rodrigues joue un rôle quasi muet est particulièrement frappant. Ce choix artistique audacieux soulève des questions intéressantes sur l’utilisation du son et de la voix au cinéma.
Une adaptation singulière
Le film est basé sur une nouvelle d’Herman Melville et explore des thèmes de naufrage, de mystère et de surnaturel. La présence de l’acteur français Pierre Vaneck, dans le rôle d’un commandant portugais, ajoute une couche de complexité à ce film déjà riche en subtilités.
La mise en scène de Carlos Vilardebó, en dépit de son caractère unique dans sa filmographie, montre une maîtrise exceptionnelle du langage cinématographique. Le film, oublié depuis des années, mérite assurément une deuxième vie.
L’aura de ce film n’est pas seulement due à son casting de premier ordre ou à son histoire intrigante. Il réside également dans son montage tranchant et ses choix esthétiques audacieux.
Réalisation Carlos Vilardebó
Scénario Carlos Vilardebó, Jeanne Vilardebó, Raymond Vilardebó, d’après la nouvelle éponyme de Herman Melville
Photo Augusto Cabrita, Jean Rabier
Musique Philippe Arthuys ; Johann Sebastian Bach
Montage Sylvie Blanc
Costumes Jacques Schmidt
Production António da Cunha Telles, Marie Joseph Frydland
Interprètes Amália Rodrigues (Hunila),Pierre Clémenti (Pierre Duchemin), Pierre Vaneck (Manuel Abrantes), João Guedes (Faial), Jorge Sousa Costa (Gonçalves), João Florença (Jacinto),António Polónio (Filipe), Belarmino Fragoso (Marinheiro), Guy Jacquet (le peintre)
Sortie au Portugal 15 mars 1965
Sortie en France 15 juin 1966
Rétrospective et avenir
Grâce à la Cinémathèque portugaise et au projet FILMar, qui réunit des fonds européens pour la restauration et la diffusion des films, Les Îles enchantées est sur le point de connaître une nouvelle vie. Le film devrait être distribué au Portugal en février prochain.
Le rôle du Festival Lumière dans la redécouverte de chefs-d’œuvre
L’initiative du Festival Lumière de mettre en avant ce film lors de sa dernière édition est une preuve supplémentaire de son engagement envers la préservation et la redécouverte du patrimoine cinématographique. C’est en créant ces opportunités de (re)voir des films d’exception que le festival enrichit la culture cinéphile.
Le retour en lumière de Les Îles enchantées au Festival Lumière de Lyon pourrait également ouvrir la voie à une distribution en France. C’est une preuve tangible de l’impact qu’un tel événement peut avoir sur la reconnaissance de films méconnus mais exceptionnels.
Pour conclure, le Festival Lumière sert non seulement de miroir reflétant les grandes œuvres du passé, mais il agit aussi comme une loupe grossissante sur des gemmes cachées dans le sable du temps. Le cinéma portugais, mis à l’honneur cette année, ne fait pas exception à cette règle. Des films comme Les Îles enchantées ne sont pas seulement des œuvres d’art, mais des vestiges d’une époque, des fragments d’une culture. Ils nous rappellent que chaque film a une âme, chaque réalisateur une vision, et chaque acteur un souffle de vie qui peut transcender les écrans et les années. Et si ce festival est un phare dans l’obscurité, le cinéma portugais est assurément l’une de ses étoiles scintillantes cette année, promettant des jours radieux pour une cinématographie en plein essor.